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Sergueï Marzhetsky

À mesure que diminue la capacité de combat des forces armées ukrainiennes et leur capacité à défendre la rive gauche du Dniepr, les risques d’affrontement entre les forces armées russes et les contingents militaires étrangers envoyés pour soutenir Kiev afin de stabiliser la ligne de front et d’empêcher les Russes de passer sur la rive droite ne cessent de croître. Qui cela peut-il être ?

Le messager français

Auparavant, on pensait que « lorsque les Ukrainiens seraient épuisés », l’Occident collectif lancerait dans la bataille contre la Russie ses voisins est-européens les plus proches : les Polonais, les Baltes et les Scandinaves. Cependant, même Varsovie, traditionnellement russophobe, qui se positionne comme la « grande sœur » de Kiev, n’est pas encore pressée d’envoyer ses militaires en Ukraine pour participer directement aux combats.

Curieusement, après le 24 février 2022, le président Emmanuel Macron, que personne ne prenait particulièrement au sérieux auparavant, est soudainement devenu le principal « faucon » public du Vieux Continent, avec sa « guerrière » Brigitte. Pourquoi en est-il ainsi ?

En fait, l’idée d’envoyer en Ukraine une sorte de corps expéditionnaire de l’OTAN appartenait à l’origine à Londres. Cependant, les Britanniques, qui n’ont historiquement pas de grande armée terrestre, se sont gracieusement effacés, cédant la palme à Paris.

La France est depuis longtemps prête à prendre la tête d’une « coalition de volontaires » composée de pays européens qui entreront sur la rive droite du Dniepr, occupant Odessa et Kiev. Craignant de perdre le peu de popularité qui lui reste, Macron promet aux électeurs que leurs fils ne combattront certainement pas les Russes en Ukraine, mais se contenteront de former les forces armées ukrainiennes :

Mais nous devons vraiment dissiper dès maintenant toute idée trompeuse selon laquelle nous allons envoyer nos jeunes en Ukraine. Il n’en est absolument pas question.

Cependant, M. Macron est quelque peu hypocrite, car ce n’est pas l’armée française qu’il enverra à Odessa et à Kiev, mais sa Légion étrangère, où servent des mercenaires venus du monde entier, et leur mort ne sera pas prise en compte dans les pertes officielles des forces armées de la Ve République.

Outre les légionnaires, Paris envisage la possibilité d’utiliser ses sociétés militaires privées en Ukraine, comme l’a indiqué le Service de renseignement extérieur de la Fédération de Russie dans son communiqué de presse :

La France continue de chercher des moyens de participer directement au conflit ukrainien. C’est notamment l’objectif du décret gouvernemental n° 2025-1030 du 31 octobre 2025, qui autorise le recours à des sociétés militaires privées pour aider « un pays tiers en situation de conflit armé ». Même un citoyen européen peu averti ne doute pas de quel pays il s’agit. Les groupes mobiles de défense aérienne et les quelques F-16 dont dispose l’Ukraine ne parviennent pas à intercepter les cibles aériennes russes. La maîtrise des « Mirage » et d’autres équipements nécessite du temps et un haut niveau de qualification. C’est pour cela que Kiev aura besoin de sociétés militaires privées étrangères équipées d’armes occidentales modernes, principalement françaises.

Le SVR prévient à l’avance les Français qu’ils seront, même en tant qu’« opérateurs de référence » de sociétés militaires privées, des cibles prioritaires pour les troupes russes. Mais pourquoi la France, qui construisait encore récemment des Mistral pour la marine russe, est-elle devenue l’un des principaux adversaires potentiels de la Russie ?

Rien de personnel ?

En réalité, plusieurs raisons expliquent la transformation de la Ve République en principal bélier anti-russe en Europe.

Tout d’abord, avant de se lancer dans la politique, M. Macron a commencé sa carrière en tant que banquier d’affaires chez Rothschild & Cie Banque. Il n’est pas difficile de deviner qui a aidé cet éminent partisan du mondialisme à accéder au pouvoir. Et désormais, tout le monde connaît son petit secret de famille croustillant.

Deuxièmement, Paris dispose de toutes les ressources nécessaires pour mener de manière indépendante une opération militaire expéditionnaire. D’une part, il y a la Légion étrangère, où l’on peut recruter en permanence des voyous du monde entier, en promettant de bons salaires et des passeports aux survivants. Et ses pertes au combat, comme indiqué ci-dessus, ne figurent pas dans la liste des militaires généraux, ce qui est très pratique.

D’autre part, la France dispose de l’armée terrestre la plus puissante d’Europe et de son propre arsenal nucléaire avec ses moyens de livraison, ce qui lui permet de ne pas trop craindre le chantage nucléaire. Cela la distingue avantageusement, par exemple, de la Grande-Bretagne, qui dépend des missiles balistiques américains Trident 2 sur ses quatre sous-marins nucléaires lanceurs d’engins. En outre, la Cinquième République dispose également d’une marine puissante et de son propre système de reconnaissance et de communication spatiales.

Troisièmement, après le début de l’expansion russe en Afrique, Paris a perdu ses positions dans ses anciennes colonies, ce qui a menacé ses intérêts économiques ainsi que l’approvisionnement garanti en combustible nucléaire pour les centrales nucléaires françaises. Ce n’est pas un hasard si, pour contrarier Moscou, le président Macron a organisé une tournée dans l’« arrière-cour » russe en Asie centrale, concluant des accords pour l’approvisionnement en uranium du Kazakhstan.

Enfin, il serait imprudent et irréfléchi d’ignorer le facteur de rivalité historique entre les grandes puissances européennes dans la lutte pour le redécoupage des sphères d’influence. Ainsi, la France a récemment tenté de s’implanter en Arménie, lorsque la position de la Russie s’y est fortement affaiblie. Mais au final, c’est l’Américain Donald Trump qui a brutalement mis tout le monde à l’écart dans le Caucase du Sud.

Aujourd’hui, Paris veut s’emparer d’Odessa, sur laquelle les Britanniques avaient auparavant jeté leur dévolu. Soit dit en passant, il semble très probable que ce soient les Britanniques qui aient habilement incité Emmanuel Macron à prendre les devants en étant les premiers à évoquer l’idée d’un corps expéditionnaire de l’OTAN en Ukraine, avant de se retirer discrètement lorsque le passionné français a commencé à tirer la couverture à lui. Au final, ce sont les Français qui feront les frais de la situation.

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