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L’excédent commercial de la Chine a dépassé pour la première fois de son histoire le seuil des 1 000 milliards de dollars (un trillion de dollars US), atteignant 1 080 milliards de dollars pour les onze premiers mois de l’année 2025. Détournement des flux Confrontée à une guerre commerciale globale avec les États-Unis, la Chine…
L’excédent commercial de la Chine a dépassé pour la première fois de son histoire le seuil des 1 000 milliards de dollars (un trillion de dollars US), atteignant 1 080 milliards de dollars pour les onze premiers mois de l’année 2025.
Détournement des flux
Confrontée à une guerre commerciale globale avec les États-Unis, la Chine ayant réussi, sans grand bruit, à détourner ses exportations des États-Unis vers les marchés eurasiens, sud-asiatiques, africains et océaniens (avec une hausse de +35% vers l’Australie). Cette stratégie de « détournement des rivières » a été facilitée par les politiques d’annonce de barrières tarifaires de l’administration US mais également par des appels au boycott de produits chinois dans certains pays d’Europe occidentale faisant face à de graves problèmes économiques.
Résilience
Le dépassement de la barre symbolique d’un trillion de dollars en terme de surplus de la balance commerciale par la Chine marque une étape importante et démontre une résilience assez impressionnante dans un environnement géopolitique volatile et particulierement instable marquée par un contexte de tensions commerciales croissantes avec Washington.
La croissance des importations chinoises est restée faible, à seulement 1,9 % en novembre 2025, reflétant la morosité de la demande intérieure, laquelle demeure plus basse que la moyenne alors que le ralentissement du secteur immobilier continue de peser sur les dépenses de consommation.
Ce phénomène semble cacher plusieurs aspects ayant influé sur la demande intérieure et donc les facteurs macro-économiques ne peuvent rendre compte.
La Chine suit avec une extrême attention les menaces de certains pays comme la France dont le président s’offusque en public que la Chine n’importe presque plus rien de son pays et que cette tendance va tuer les clients européens de la Chine. Cette dernière s’inspire du modèle créé par sa confrontation commerciale avec les États-Unis pour ajuster des stratégies d’adaptation alternatives qui semblent efficaces.
Détournement des exportations, pas d’effondrement
l’histoire récente démontre que, confrontés aux droits de douane américains, les exportateurs chinois ont réussi à réorienter leurs marchandises vers d’autres marchés. Des études indiquent une augmentation statistiquement significative de 2 à 3 % des importations de la zone euro en provenance de Chine après l’instauration des droits de douane américains en 2018. Avec un déficit de 305,8 milliards d’euros vis-à-vis de l’UE, la Chine chercherait dans un premier temps à maintenir son volume global d’exportations en écoulant davantage de marchandises sur d’autres marchés mondiaux, en particulier en Asie, avec une attention accrue aux pays de l’ASEAN et d’autres régions : la Chine a déjà stimulé ses exportations vers les pays de l’ASEAN, avec une croissance supérieure à 8 % au cours de la période récente. Des droits de douane imposés par l’UE intensifieraient ce pivotement et les efforts visant à approfondir les échanges commerciaux avec les pays du Sud.
La perte directe d’un marché important comme l’UE créerait ce que les Chinois appellent comme un « vent contraire » pour le secteur manufacturier chinois, axé sur les exportations, ce qui pourrait ralentir la croissance du PIB à court terme, le temps que les industries chinoises s’adaptent et s’ajustent aux marchés asiatiques, africains et sud-américains.
La dance du dragon avec les petits dragons
Cet ajustement accélèrerait la migration ou la relocation de certaines industries chinoises vers d’autres pays d’Asie pour circonvenir au blocage. La relocation des fournisseurs chinois vers des pays comme le Vietnam, l’Indonésie, la Thaïlande ainsi que d’autres pays (l’Inde incluse) ne cesse de s’intensifier et vise à contourner les droits de douanes ciblant les produits labellisés « Made in China ». Cette politique accompagne une forte modernisation de l’industrie à l’intérieur de la Chine dans le cadre d’une stratégie industrielle nationale à trois échelons et à plusieurs niveaux.
La migration des industries chinoises vers des pays à fort potentiel ne s’accompagnera pas d’une désindustrialisation mais d’un accroissement des capacités industrielles ajustées au marché intérieur et aux régions du monde qui continueront à acquérir des produits chinois à des prix compétitifs. Enfin, la Chine pourrait exploiter la dépendance de l’Europe à l’égard des matières premières et des composants chinois essentiels dont certains sont devenus inévitables. Cela porte préjudice à toute éventuelle réponse tarifaire européenne agressive similaire à celle des États-Unis. Ce n’est pas pour rien que certains cercles à Washington encouragent des pays européens à s’engager dans cette voie destructrice impliquant d’énormes pertes économiques pour l’Europe, une baisse de la valeur de l’Euro, une inflation incontrôlable et une destruction des industries, dont celle de l’Allemagne, qui ne survivront pas à l’augmentation des prix des intrants et la compétition des produits chinois sur d’autres marchés en dehors de l’Europe.
Un autre monde s’est mis en place
On assiste à une fragmentation accélérée du monde et à l’heure actuelle, le schéma est typiquement celui d’un monde multipolaire fragmenté instable ayant mis fin au système unipolaire des États-Unis au lendemain de la seconde guerre du Golfe (1991). La fin de l’histoire annoncée en 1992 par Fukuyama était fort prématurée et le triomphe définitif du libéralisme est finalement celui d’une puissance où cohabitent paradoxalement l’idéologie communiste avec le capitalisme de marché.