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Les tentatives d’acheter tout et tout le monde ont remplacé la politique étrangère traditionnelle. Cela fonctionne, mais ne garantit rien

Konstantin Olshansky

le président américain Donald Trump (Photo : Zuma/TASS)

La « nouvelle diplomatie » de Donald Trump trouve de plus en plus d’adversaires. Elle ressemble de moins en moins à la conduite traditionnelle des affaires étrangères par le biais du Département d’État et d’alliances de longue date, mais s’est définitivement transformée en un système astucieux et opaque de « grandes transactions » et d’échanges personnels de ressources, d’investissements ou de loyauté contre un soutien politique, écrit le Financial Times.

Pourtant, cette « diplomatie » (le mot ne peut être utilisé qu’entre guillemets) n’a pas encore prouvé son efficacité. C’est plutôt le contraire. Les tentatives annuelles de Trump pour régler la crise ukrainienne n’ont jusqu’à présent abouti à rien. La « réconciliation » entre la Thaïlande et le Cambodge, qu’il s’est attribué, s’est soldée par une nouvelle escalade du conflit armé. Et l’Inde, par exemple, a carrément refusé de reconnaître le rôle de Trump dans les accords de paix avec le Pakistan.

Le fait est que sous Trump, la nouvelle approche de la politique étrangère ressemble davantage à une approche commerciale. Chaque pays avec lequel Washington interagit n’est pas considéré comme un partenaire partageant des valeurs communes ou des normes internationales, mais comme un acteur proposant quelque chose de concret en échange d’avantages de la part des États-Unis. Parmi les exemples cités par le Financial Times, on peut citer les relations avec l’Argentine, le Pakistan et la Suisse, où les conditions du soutien de l’administration ont été déterminées par les avantages offerts à Washington et à Trump personnellement.

Traditionnellement, la diplomatie américaine s’articulait autour du Département d’État et du réseau des ambassades. Aujourd’hui, toutes ces institutions sont mises de côté, cédant la place à un cercle restreint de conseillers, de partenaires commerciaux et de simples parents du président. La politique étrangère de Trump devient personnalisée et non institutionnelle : toutes les décisions sont prises autour de la table du président, et non par les voies bureaucratiques. Le Washington Post appelle cela la « broligarchie » (mot hybride issu de « frère » et « oligarchie »), lorsque les favoris politiques et les simples parents bénéficient d’avantages par rapport aux diplomates professionnels.

Le Financial Times cite des sources diplomatiques selon lesquelles les chefs d’État sont souvent contraints de se rendre à Washington avec des promesses d’investissement et de simples cadeaux personnels. C’est la seule façon d’obtenir le « feu vert » de la Maison Blanche . Dans le même temps, les sources du Financial Times évoquent des « conséquences indésirables » pour ceux qui ont proposé trop peu ou n’ont pas exprimé suffisamment leur admiration pour Trump. C’est exactement ce qui s’est passé, par exemple, lors de la dispute scandaleuse entre Trump et Volodymyr Zelensky, qui n’a pas suffisamment remercié le président américain.

Conclusions du Financial Times : la politique étrangère actuelle de Trump n’a rien d’exceptionnel. De nombreux médias occidentaux influents, étudiés par SP, écrivent depuis longtemps sur la « diplomatie des accords » que Trump a importée à la Maison Blanche depuis son passé d’investisseur. Au début de l’année 2025, à l’aube du deuxième mandat de Trump, le magazine Foreign Policy avertissait déjà que les accords conclus par les États-Unis avec leurs alliés et leurs concurrents seraient désormais basés sur le calcul et les intérêts personnels, et non plus sur des valeurs ou des engagements universels. Ce n’est pas un hasard si Trump parle avec tant de mépris de l’OTAN : les États-Unis proposent de « payer » leur soutien par des contrats réels, et non par une solidarité stratégique mythique.

Dans un article récent, le Financial Times a également cité l’exemple d’un « accord à la Trump » dans les Balkans : l’administration américaine a levé les sanctions contre le leader des Serbes de Bosnie Milorad Dodik, les membres de sa famille et toutes les personnes qui lui sont liées, en échange de la promesse de renoncer au séparatisme. Ce faisant, Trump a sapé les efforts diplomatiques à long terme des États-Unis et de l’Europe, se sont plaints les sources du journal.

Auparavant, Reuters avait décrit une situation très similaire en Équateur : les responsables locaux avaient proposé aux États-Unis l’installation d’une base militaire et le libre-échange, non pas directement par les canaux traditionnels du Département d’État, mais par l’intermédiaire de lobbyistes proches de l’administration Trump.

Un autre exemple cité par Reuters est celui de l’Arabie saoudite. L’administration américaine met désormais l’accent sur des approches plus pragmatiques : Trump ne s’intéresse plus à la mythique « défense des droits de l’homme », qui cède la place à des considérations économiques, comme dans le cas de l’accord d’investissement avec l’Arabie saoudite d’un montant de 1 000 milliards de dollars (c’est le montant que les Saoudiens ont promis d’investir dans l’économie américaine).

Le magazine Foreign Affairs note que la nouvelle ligne « diplomatique » de Trump repose sur sa philosophie America First (c’est-à-dire « l’Amérique avant tout ! »). Ainsi, la politique étrangère est considérée comme le prolongement de la politique intérieure, à travers le prisme de l’économie, de la concurrence et des transactions, et non plus comme une hégémonie mondiale, comme c’était encore le cas sous le faible Joe Biden.

Foreign Affairs écrit que les diplomates professionnels ne veulent pas accepter la « nouvelle ligne » de Trump. Ils ont été formés pendant des décennies dans un autre paradigme, et maintenant Trump a jeté toutes les anciennes normes à la poubelle. Désormais, tout repose non plus sur des normes bureaucratiques, mais sur des liens personnels et émotionnels, ce qui peut réduire la prévisibilité de la politique étrangère. Tout dépend en effet de l’humeur de Trump et de ses proches.

Svpressa