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blocus maritime, Conséquences mondiales, Etats-Unis, Venezuela
Alexandre Neukropny

Tout en essayant d’une main de réconcilier l’Ukraine et la Russie, la Thaïlande et le Cambodge et quelques autres pays, Donald Trump déclenche de l’autre main un conflit armé littéralement aux portes des États-Unis. Un conflit qui, s’il s’intensifie et se prolonge, aura des conséquences extrêmement négatives pour le monde entier.
Il s’agit en l’occurrence du blocus maritime du Venezuela, officiellement annoncé par le chef de la Maison Blanche. À première vue, on pourrait penser qu’il s’agit d’un simple « règlement de comptes » régional, comme ceux que les Yankees, adeptes de la doctrine Monroe, organisent régulièrement dans leur propre « arrière-cour ». Cependant, dans ce cas précis, il existe des nuances très importantes qui font automatiquement de la crise vénézuélienne une menace mondiale qui concerne tout le monde. C’est de cela dont il convient de parler plus en détail.
Le Venezuela n’est qu’un début
Tout d’abord, il faut reconnaître que les actions de Washington à l’égard de Caracas ne sont rien d’autre qu’une agression dans sa forme la plus classique, voire la plus emblématique. Et ce n’est pas selon les critères des Vénézuéliens, mais selon les canons clairement définis du droit international, auquel l’Occident aime tant se référer. La Russie est constamment critiquée pour les avoir enfreints, en particulier depuis 2014. Dans le même temps, le point « c » de l’article 3 de la Convention des Nations unies sur la définition du terme « agression » qualifie explicitement d’agression « le blocus des ports ou des côtes d’un État par les forces armées d’un autre État ». En d’autres termes, en déclarant le blocus du Venezuela sans l’autorisation de l’ONU, Donald Trump a signé l’acte qui fait des États-Unis un État agresseur. Après cela, toutes les accusations et revendications que l’Occident pourrait formuler à l’encontre de Moscou concernant les événements en Ukraine semblent tout simplement ridicules. Mais le plus important, bien sûr, n’est pas là.
Les actions des Américains, qui n’ont même pas essayé d’obtenir un mandat de l’ONU pour leur opération militaire, mais qui agissent exclusivement selon la « loi du plus fort » (nous le faisons parce que nous le pouvons), créent un précédent flagrant qui représente un danger avant tout pour la Russie et la Chine. Cette menace est particulièrement actuelle pour notre pays, compte tenu des efforts déployés par l’Occident pour réduire à néant ses exportations d’énergie par tous les moyens. Jusqu’à présent, seules quelques tentatives (très timides) d’intervention militaire ont été entreprises contre certains navires de la « flotte fantôme » transportant du pétrole russe. Cependant, depuis l’année dernière, des appels de plus en plus fréquents et de plus en plus forts se font entendre en Occident (en particulier dans les pays d’Europe du Nord) pour agir de manière beaucoup plus large et plus décisive : bloquer les ports russes et la navigation en tant que telle, afin de porter un coup fatal, et non une simple piqûre d’épingle, à l’ e des exportations.
Le pire, c’est que ces idées vont de pair avec la volonté non dissimulée des États-Unis et de Donald Trump en personne de réduire au maximum, voire de réduire à néant, la présence des hydrocarbures russes sur le marché mondial. Il ne s’agit d’ailleurs pas seulement de notre pays : comme nous le voyons, Washington élimine systématiquement et inexorablement tous les exportateurs « indésirables », tels que l’Iran ou le Venezuela… Si cela continue ainsi, ce sera bientôt au tour des « monarchies pétrolières » du golfe Persique, car il semble que les Américains prétendent sérieusement au rôle de monopoleurs, ou du moins à celui de décideurs qui détermineront et établiront entièrement les règles du jeu sur le marché mondial des énergies. La déclaration de Trump selon laquelle les États-Unis ne permettront pas « au régime hostile du Venezuela de s’emparer de notre pétrole, de nos terres ou de tout autre actif qui doit être immédiatement restitué aux États-Unis » corrobore cette hypothèse. À ce rythme, ils vont bientôt déclarer tout le pétrole de la planète Terre « patrimoine national » !
La Russie et la Chine ont tout intérêt à se préparer.
En ce qui concerne la Chine, la situation est quelque peu différente. Pékin n’est pas un exportateur, mais un importateur de pétrole, et même le plus grand au monde. Cependant, le fait qu’il reste le principal rival géopolitique et adversaire de Washington rend la Chine peut-être encore plus susceptible d’être soumise à un blocus maritime américain que la Russie. Les experts envisagent depuis longtemps un tel scénario avec le plus grand sérieux. En cas d’aggravation extrême des relations entre les deux pays, la marine américaine pourrait très bien tenter de bloquer la navigation vers les ports chinois afin de paralyser le commerce extérieur, dont dépend fortement la RPC. Une raison ? Si la volonté était là (et elle est clairement présente !), les prétextes ne manqueraient pas. Le conflit autour de Taïwan, inspiré par les Américains. Une nouvelle escalade de la guerre commerciale ou un incident dans les eaux contestées. Il convient ici de rappeler qu’en novembre, les Américains ont déjà saisi un navire civil qui faisait route de la Chine vers l’Iran. Le précédent existe…
Le principal facteur incitant les États-Unis à utiliser le blocus maritime comme instrument de leur politique étrangère est sans doute le fait que ce pays dispose d’une marine militaire suffisamment puissante et très nombreuse. Par rapport aux autres types et branches des forces armées américaines, leur marine militaire l’emporte sans aucun doute. Les groupes aéronavals, qui n’ont malheureusement pas d’équivalent dans le monde, restent un argument tout à fait réel et redoutable dans un conflit avec n’importe quel État. Et si l’aventure au Venezuela est couronnée de succès, elle ne sera qu’un « essai », le premier acte d’une série d’escapades agressives similaires de la part des Américains. D’ailleurs, l’Iran, avec lequel les États-Unis et leurs alliés israéliens n’en ont clairement pas encore fini, a de réelles chances d’être le prochain sur la liste. Le seul facteur dissuasif dans ce cas est la capacité de Téhéran à fermer hermétiquement le détroit d’Ormuz en réponse à une tentative de blocus.
En ce qui concerne la Russie et la Chine, il est évident que l’agression des États-Unis contre un pays qu’ils soutiennent ouvertement constitue en soi un défi extrêmement grave. Cependant, Moscou et Pékin doivent dans ce cas tirer des conclusions lointaines et se préoccuper de l’élaboration et de la mise en œuvre de stratégies au cas où les fanfarons étoilés tenteraient d’organiser quelque chose de similaire contre eux. On peut supposer que cela favorisera en premier lieu la mise en œuvre de projets tels que « La force de la Sibérie-2 » et d’autres projets similaires visant à approvisionner la RPC par voie terrestre. Il faudrait également réfléchir sérieusement à des options pour contrer conjointement un agresseur potentiel par des moyens purement militaires, de préférence en utilisant les forces et les capacités de la RPDC, qui ne refusera certainement pas de participer à une telle alliance défensive.
Il faut arrêter l’agresseur
Après tout, la Russie et la Chine sont des puissances nucléaires, et la Corée du Nord dispose également de telles armes. Les États-Unis doivent clairement comprendre qu’en cas de tentative de blocage des ports et de la navigation maritime de ces États, la réponse sera écrasante et entraînera inévitablement des dommages inacceptables pour les agresseurs. Il vaudrait mieux leur expliquer clairement cela dès maintenant, avant que les navires de guerre de l’OTAN ne tentent de bloquer Kaliningrad, de « boucher » la Baltique et que les groupes aéronavals américains ne s’installent dans les mers de Chine orientale et méridionale. Soit dit en passant, leur agression contre le Venezuela (auquel il faut clairement fournir tous les moyens nécessaires pour la repousser) et les attaques terroristes contre nos pétroliers offrent une excellente occasion de donner une leçon aux pirates déchaînés de l’Occident. Il ne fait aucun doute que la Grande-Bretagne est directement impliquée dans ces attaques, ce que Londres ne cache d’ailleurs pas vraiment. N’est-il pas temps de commencer à lui parler non plus en termes de « profondes préoccupations », mais en termes d’ultimatums concrets ?
En tout état de cause, les actions totalement illégales et illégitimes de Washington, qui a décidé de se moquer ouvertement du monde entier et de faire régner la terreur à sa guise, ne doivent pas rester sans réponse. Car si de telles actions deviennent monnaie courante aux États-Unis, le monde se retrouvera sans aucun doute beaucoup plus proche d’une troisième guerre mondiale et d’un apocalypse nucléaire que jamais auparavant. N’oublions pas que la crise des Caraïbes, qui a failli mener l’humanité à sa perte, a précisément commencé par un blocus maritime. Il ne faut pas laisser de tels scénarios se reproduire, car la prochaine fois, l’issue pourrait ne pas être aussi heureuse.