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par Edouard Husson

TTU – des régiments français seraient en route pour la Roumanie, avant d’aller à Odessa

Déployer 20 000 soldats français en Ukraine? Affronter la Russie? Le général Schill, Chef d’Etat-Major de l’Armée de Terre (CEMAT), donc l’un des plus hauts gradés français, en parlait ouvertement hier 19 mars dans le journal « Le Monde ». Une partie de notre monde dirigeant est prise d’une douce folie. La Russie serait une petite puissance, surestimée. La France serait en moyen, avec d’autres pays de l’Union Européenne, de déployer quelques dizaines de milliers d’hommes et de tenir le Dniepr. Une analyse détaillée de l’analyste militaire Simplicius nous aide à faire le point sur ce qui se passe dans les coulisses du pouvoir à Paris. Dans l’objectif de mettre les Français devant le fait accompli? Ou bien dans une fuite en avant pour tenter (vainement) de repousser la terrible onde de choc que produira l’annonce de l’effondrement militaire ukrainien?

Simplicius, l’un des meilleurs chroniqueurs de la guerre d’Ukraine, le dit sans détours:

Les choses continuent de s’envenimer en Ukraine, la France poursuivant sa spirale d’escalade.Simplicius The Thinker, 20 mars 2024

Comme Eric Verhaeghe vous le soulignait ce matin, il y a visiblement des « éléments de langage » à l’œuvre. Vendredi dernier, Emmanuel Macron développait le premier, de retour de Berlin, la thèse de la surestimation de la puissance russe.

« Poutine a un discours de peur. Il ne faut pas l’intimider, nous n’avons pas devant nous une grande puissance. La Russie est une puissance moyenne avec une arme nucléaire, mais dont le PIB est bien inférieur à celui des Européens, inférieur à celui de l’Allemagne, de la France ».Emmanuel Macron dans « Le Parisien », 15 mars 2024

Apparemment, Emmanuel Macron n’a jamais entendu parler du calcul du Produit Intérieur brut en parité de pouvoir d’achat (p.p.a.). Voici une capture d’écran des anticipations du PIB pour 2024 du Fonds Monétaire International, en p.p.a. La Russie n’est pas loin derrière l’Allemagne et trois places devant la France:

La Banque Mondiale considère même qu’en 2023 la Russie aurait dépassé l’Allemagne et serait devenue, en p.p.a., le premier PIB d’Europe.

En tout cas, la faiblesse russe, c’est la rhétorique que Nicolas Tenzer partage avec Emmanuel Macron.

Pierre Schill (CEMAT): la France pourrait mobiliser 20 000 hommes en 30 jours

Hier nous vous faisions part de l’estimation du renseignement extérieur russe, d’un déploiement français de 2000 hommes. Mais Sergueï Narychkine nous prête des ambitions trop modestes. Pierre Schill, le chef d’état-major de l’armée de terre (CEMAT) l’affirme dans Le Monde daté du 19 mars:

La France a la capacité d’engager 20 000 hommes dans un délai de trente jours et se dote des moyens de commander jusqu’à 60 000 hommes.Le Monde, 19 mars 2024

Comme dans la Macronie on ne doute de rien, LCI a élaboré les scénarios avec le lieutenant-colonel Vincent Arbaretier discutant ouvertement des types de déploiement militaire que les troupes françaises peuvent entreprendre en Ukraine:

Pour mesurer l’emballement, présentons juste la carte affichée à la télévision:

En écho au CEMAT, un lieutenant-colonel en retraite voudrait nous faire croire qu’avec 20 000 hommes, l’armée française pourrait tenir un choc face à l’armée russe et défendre la position du Dniepr. Là où deux armées de 600 000 hommes se font face actuellement, sur un front de plus de 1000 km.

Un autre rapport russe prouverait l’effectivité des préparatifs français

Bien entendu, nous faisons la part des intoxications possibles de la part des Russes. Mais on se rappellera que nous discutons d’un débat lancé par le Président de la République lui-même. Un autre rapport russe apporterait des informations complémentaires:

Selon des informations basées sur des interceptions de conversations et de mails, la France mobilise 1800 réservistes chauffeurs poids-lourds pour convoyer essence et matériel militaire en Ukraine. Marie Mercier, obscure sénatrice de la Saône-et-Loire mais vice-présidente du groupe d’amitié France-Ukraine au Sénat, semble coordonner cette opération en liaison avec André Accary (à gauche sur la photo), président du conseil départemental de Saône-et-Loire. L’organisation opérationnelle aurait été confiée à Régis Poiraud (à droite sur la photo), sous-officier de réserve et président de l’UDSOR (Union Départementale des Sous-Officiers) en Saône-et-Loire, proche de la sénatrice Mercier.

Selon un spécialiste des affaires militaires françaises s’exprimant sous condition d’anonymat, le fait que l’opération passe par des “politiques” et un maitre d’oeuvre réserviste pourrait s’expliquer par une importante fronde et “résistance passive” de nombreux officiers réticents à la volonté de Macron d’engager la France dans une guerre contre la Russie.

(…)L’assistante de la sénatrice, contactée hier par téléphone, a immédiatement confirmé l’opération. Une heure plus tard la sénatrice et le président du conseil départemental, contactés eux aussi par téléphone, ont nié avec véhémence, la sénatrice oscillant entre panique et hystérie. L’assistante de la sénatrice a alors prétendu avoir “mal compris”.
Régis Poiraud, contacté ce soir par téléphone, a semblé très “secoué” par nos questions et s’est finalement contenté d’un laconique “il ne m’appartient pas de répondre à vos questions” avant de couper la communication.

On notera que la caserne Carnot dans la ville de Chalon (Saône-et-Loire) est spécialisée dans la fourniture de carburant aux forces armées françaises. Une cérémonie y regroupait il y a quelques jours tous les protagonistes de cette affaire. L’approvisionnement en carburant étant un élément critique de toute opération militaire, le but de cette opération s’inscrit  parfaitement dans l’envoi de troupes au sol  annoncé à plusieurs reprises par Macron.

Les réactions des personnes mises en cause, confirmées par une interception de mail que nous ne pouvons pas diffuser pour protéger notre source, semblent montrer la réalité de cette opération qui engage donc Macron un peu plus encore sur le chemin de la guerre avec la Russie.L’équipe de Boris Karpov
https://boriskarpov.tvs24.ru

Des « mercenaires » aux « légionnaires…..

Proposant un très utile tour des informations à vérifier, Simplicius cite un message X sur :

❗️French mercenaries have been spotted in Bulgaria on their way to Ukraine?

Locals claim to have seen convoys of French mercenaries and equipment near the town of Sliven, flying to Sofia and then travelling by truck to Ukraine.

The day before, the US Navy cargo ship Leroy A.… pic.twitter.com/KvxyfUoykG

— Zlatti71 (@djuric_zlatko) March 19, 2024

Des mercenaires français ont-ils été repérés en Bulgarie en route vers l’Ukraine ?

Des habitants affirment avoir vu des convois de mercenaires français et d’équipements près de la ville de Sliven, en direction de Sofia, puis par camion vers l’Ukraine. La veille, le cargo Leroy A. Mendonica de la marine américaine a livré au port d’Alexandroupolis, dans le nord de la Grèce, une cargaison d’équipements militaires destinés à être déployés en Europe dans le cadre du « renforcement des forces de l’OTAN sur le continent ».

Sans oublier que la Brigade Azov aurait publié cette vidéo opportune qui « accueille » officiellement la Légion française pour qu’elle vienne les aider en Ukraine :Sim)plicius the Thinker, 20 mars 2024

Traduction de l’écran de fin :

Toujours dans Simplicius:

Entre-temps, le journal espagnol El Pais a confirmé que des troupes européennes se trouvaient déjà depuis longtemps en Ukraine.
Par ailleurs, la ministre de la défense espagnole, Margarita Robles, a eu l’audace de parler de la « menace réelle » que les missiles de Poutine puissent atteindre l’Espagne. Heureusement, elle a semblé exclure sans équivoque le déploiement de troupes espagnoles en Ukraine à l’avenir. Mais quelqu’un peut-il m’expliquer pourquoi Poutine déciderait de frapper l’Espagne ? Les propos alarmistes et sans fondement de ces euro-mutants sont tout simplement insensé

« Nous ne pouvons pas exclure la possibilité que des soldats britanniques se rendent en Ukraine pour affronter le régime de Poutine », a déclaré l’ancien ministre britannique de la défense, Ben Wallace. Dans un article de Politico…. l’ancien chef du MI6, Richard Dearlove, met en garde :

« Si vous arrêtiez quelqu’un dans la rue ici au Royaume-Uni et lui demandiez s’il pense que la Grande-Bretagne est en guerre, il vous regarderait comme si vous étiez fou », a déclaré Dearlove. « Mais nous sommes en guerre – nous sommes engagés dans une guerre grise avec la Russie, et j’essaie de le rappeler aux gens.

Tous les « Loves » sont des gens adorables, hein ? Dearlove, Breedlove, Strangelove…Simplicius the Thinker, 20 mars 2024

La panique des dirigeants européens: l’armée ukrainienne serait proche de l’effondrement

Lisons pour finir des extraits de la dernière partie de l’article de Simplicius:

On en revient à cette question récurrente : pourquoi maintenant ?

Si la France était vraiment préoccupée par la chute d’Odessa, elle ne militerait certainement pas pour une intervention de sitôt, alors que la Russie semble être à des années lumière de menacer Odessa – à moins qu’un gigantesque assaut amphibie et aérien ne soit en préparation sans que nous le sachions.

Par déduction logique, nous ne pouvons que supposer que ce n’est pas la chute imminente d’une zone particulière, comme Odessa, qui les inquiète tant, mais vraisemblablement la désintégration de l’armée ukrainienne en tant que force militaire opérationnelle. L’un des indices à cet égard était la vidéo du colonel français, qui mettait en évidence les graphiques du déploiement hypothétique de la France dans les régions frontalières du nord de l’Ukraine ou dans la zone du fleuve Dniepr, avec précisément l’intention que nous avons exposée ici en premier lieu, à savoir soulager les unités ukrainiennes de l’arrière de leurs tâches sans histoire pour leur permettre de réapprovisionner les forces de combat qui s’amenuisent sur le front.

Cela dit, d’un point de vue technique, une division de 20 000 hommes – selon les normes de la théorie militaire classique – est censée pouvoir tenir, au maximum, un front de 10 km, à peu près, et non de plus de 700 km comme la frontière nord s’étendant du Belarus à la région de Sumy ou même le Dniepr, d’une longueur similaire. Bien sûr, il s’agit d’un front inactif, ce qui laisse une certaine marge de manœuvre, mais tout de même. Cela dit, ils pourraient chercher à ne pas couvrir tout le front, mais plutôt à libérer 20 000 combattants supplémentaires de l’armée ukrainienne, par exemple.

Mais qu’est-ce qui a pu encore ébranler Macron au point qu’il se lance dans des envolées aussi désespérées ? Eh bien, les nouvelles provenant de sources autorisées continuent d’être plutôt sombres en provenance d’Ukraine.

Borrell (le vice-président de la Commission Européenne) nous donne un indice :

« C’est ce printemps, cet été avant l’automne que la guerre en Ukraine sera décidée », a déclaré M. Borrell aux journalistes jeudi après-midi. M. Borrell a indiqué qu’au cours de toutes ses réunions, il avait insisté sur les conséquences d’une victoire russe en Ukraine.Si le président Vladimir Poutine « gagne cette guerre, conquiert l’Ukraine et met en place un régime fantoche à Kiev – comme celui que nous avons déjà au Belarus – il ne s’arrêtera pas là », a déclaré M. Borrell. « Les prochains mois seront décisifs », a-t-il ajouté, précisant que « tout ce qui doit être fait doit l’être rapidement ». (…)

L’Ukraine a désespérément besoin de plus de troupes, ses forces étant épuisées par les décès, les blessures et l’épuisement. Malgré les pertes considérables subies par la Russie, les envahisseurs sont toujours beaucoup plus nombreux que les défenseurs de l’Ukraine, un avantage qui aide Moscou à progresser sur le champ de bataille. Le parlement ukrainien débat d’un projet de loi visant à élargir la réserve de recrutement, notamment en abaissant l’âge d’admissibilité de 27 à 25 ans, mais peu de décisions sont prises à Kiev pour répondre rapidement aux besoins urgents de l’armée.

Zelensky et ses collègues affirment qu’il n’y a pas de mobilisation coercitive, mais le Washington Post réfute cette affirmation :

Les civils affirment que les recruteurs militaires s’emparent de tous ceux qu’ils peuvent. À l’ouest, la campagne de mobilisation a semé la panique et le ressentiment dans les petites villes agricoles et les villages comme Makiv, où les habitants ont déclaré que les soldats travaillant pour les bureaux de recrutement parcourent les rues presque vides à la recherche d’hommes restants. Ces tactiques ont conduit certains à penser que leurs hommes sont ciblés de manière disproportionnée par rapport à d’autres régions ou à des villes plus importantes comme Kiev, où il est plus facile de se cacher.

(…) Les responsables américains prévoient toute une série de scénarios sombres en Ukraine si l’aide militaire demandée par le président Biden ne se concrétise pas, y compris une rupture catastrophique des lignes ukrainiennes dans l’éventualité la plus grave et la probabilité de pertes massives dans le meilleur des cas.

Pour la première fois, ils utilisent ouvertement le redoutable mot « E », Effondrement :

« Cette situation n’est pas favorable à l’Ukraine à long terme, sans supplément, et elle pourrait conduire à un effondrement potentiel », a déclaré un haut fonctionnaire américain. « Mais voici ce qu’il faut retenir : Même si l’Ukraine tient bon, ce que nous disons en réalité, c’est que nous allons mettre en jeu d’innombrables vies pour y parvenir ».

Dans l’article, le directeur de la CIA, M. Burns, est cité en train de dire que les pertes territoriales de cette année seront « significatives » si l’aide n’est pas apportée.

Sous le couvert de l’anonymat, une autre source gouvernementale américaine a déclaré « La question de savoir si cela se terminera par un effondrement ou des pertes importantes reste un sujet de débat interne, a déclaré le haut fonctionnaire. « Mais il n’y a pas d’avenir radieux pour l’Ukraine sans un soutien supplémentaire et continu des États-Unis.

Comme vous pouvez le constater, ils ont franchi le dernier gouffre et invoquent maintenant le dilemme le plus interdit : l’effondrement total de l’Ukraine. Est-ce là l’explication de l’urgence soudaine et des discussions désespérées sur l’injection de troupes de l’OTAN ? Les choses au sein de l’armée ukrainienne sont-elles bien pires qu’il n’y paraît ?Simplicius the Thinker, 20 mars 2024

Confrontée à l’inéluctable défaite militaire de l’Ukraine, les dirigeants occidentaux commencent à paniquer: ils ont tellement assuré que la Russie serait repoussée chez elle….Comment détourner l’onde de choc que produira sur la caste une défaite ukrainienne?

Emmanuel Macron et l’Etat-major français ont choisi la fuite en avant!

Le Courrier des Stratèges