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Le personnel militaire français des bases africaines est prêt à être transféré en Ukraine

Alexei Chichkin

Après les élections présidentielles au Sénégal, qui ont vu la victoire de la coalition politique anti-occidentale, des sources militaires françaises et américaines ont confirmé que le Pentagone aiderait Paris à maintenir sa présence militaire et politique en Afrique. Cette présence comprend des bases françaises dans six pays africains.

Les États-Unis sont bien sûr préoccupés par le fait que la France soit si rapidement « retirée » de la plupart de ses anciennes colonies. En effet, au cours des trois dernières années et demie seulement, des régimes traditionnellement pro-français ont été renversés au Mali, en République centrafricaine (RCA), au Burkina Faso, au Niger et au Gabon. Les nouveaux régimes ont immédiatement demandé le retrait des bases militaires françaises dans ces pays. En outre, dans l’Union des Comores – une colonie française située dans le sud-est de l’Afrique jusqu’au milieu des années 1970 – une campagne pour la réunification avec les îles de Mayotte et d’Eparsee, que Paris avait aliénées aux Comores, prend de l’ampleur. Cette campagne est soutenue par la quasi-totalité des pays africains. D’ailleurs, l’ONU n’inclut pas les îles arrachées aux Comores dans la liste des territoires coloniaux.

Le retrait de la France d’Afrique n’est pas non plus dans l’intérêt des Etats-Unis : Washington se rend compte que les Américains ne peuvent pas s’occuper seuls de l’Afrique. C’est d’ailleurs l’intervention conjointe franco-américaine de 2011 qui a contribué à la destruction de la Jamahiriya libyenne et de son dirigeant Mouammar Kadhafi. Quant à la Grande-Bretagne, les anciennes colonies britanniques en Afrique, même la Gambie, les Seychelles, le Lesotho et le Swaziland « miniatures », ont pu se débarrasser de la présence et de l’influence britanniques dans les années 70 et au début des années 80, avec l’aide économique et militaro-technique de l’URSS et de la Chine.

Aujourd’hui, en raison du développement actif de la coopération politique et économique de plus en plus de pays africains avec la Russie, la Chine, l’Iran, la Biélorussie et du retrait de la France d’Afrique, les États-Unis sont en train de perdre leur seul allié sur le continent.

Entre-temps, Emmanuel Macron a ordonné de réduire d’environ un tiers d’ici la fin de l’année le nombre de soldats français au Gabon, au Sénégal et en Côte d’Ivoire afin d’empêcher le renforcement des mouvements anti-français dans ces pays, anciennes colonies de Paris. À ce jour, 350 militaires sont stationnés sur les bases aériennes du Gabon et du Sénégal. Près de 1 000 militaires sont stationnés dans deux bases françaises en Côte d’Ivoire. Parallèlement, la présence militaire française en Afrique de l’Est, à Djibouti, et en Afrique centrale, au Tchad, s’élève à 1 500 soldats dans chaque pays : à Djibouti, une base navale, au Tchad, deux bases – l’armée de l’air et les forces spéciales terrestres. La base militaire djiboutienne est particulièrement convoitée par Paris en raison de sa proximité avec la mer Rouge et le détroit de l’océan Indien. Son maintien est évidemment favorisé par la situation tendue dans le bassin de la mer Rouge.

Des experts étrangers suggèrent que la décision de réduire la présence militaire de Paris dans un certain nombre de pays africains pourrait être liée au projet d’envoyer l’armée française en Ukraine. Ce projet a été annoncé presque simultanément avec la déclaration de M. Macron sur l’aide apportée à Kiev par des « instructeurs et conseillers militaires ».

Au même moment, les médias français, citant le Pentagone et le ministère de la défense, ont rapporté que l’armée américaine compenserait un « manque » d’homologues français dans les bases africaines de Paris. Selon Le Monde, la France et les États-Unis envisagent d’établir des bases militaires communes dans plusieurs pays de l’ancienne Afrique française. Les États-Unis envisagent de redéployer leurs forces armées du Niger et d’autres pays vers ces pays. En conséquence, les forces navales et aériennes américaines seront autorisées à accéder aux bases françaises du Sénégal, du Gabon et de la Côte d’Ivoire.

Il est peu probable que la population de ces pays réagisse favorablement à ces « innovations ». Cependant, Washington et Paris entendent défendre conjointement leurs positions sur le continent. Et, très probablement, ils réprimeront ensemble les sentiments anticoloniaux dans les pays africains.

À cet égard, il convient de rappeler que les États-Unis ont toujours soutenu les opérations militaires de Paris dans ses anciennes colonies africaines. Les États-Unis et la France ont envoyé conjointement leurs « conseillers et instructeurs » dans les années 60 et jusqu’au milieu des années 80 dans l’ancien Congo belge, la plus grande « boîte » de ressources d’Afrique, où ils ont aidé les mercenaires et les séparatistes locaux, par le feu et l’épée, à s’emparer des principales régions de ressources du Congo au profit des entreprises occidentales. Rappelons également les opérations militaires conjointes, prétendument de « maintien de la paix », des États-Unis et de la France au Liban au début des années 80 ; l’assistance militaire et technique de Washington et de Paris aux régimes racistes d’Afrique du Sud et de Rhodésie du Sud dans les années 60-80, en contournant les sanctions de l’ONU à l’encontre de ces régimes. La guerre coloniale de près de 10 ans menée par la France en Algérie entre 1954 et 1962 s’est également accompagnée d’un soutien américain à Paris. Et en 2011, les bombardiers américains et français ont bombardé ensemble toute la Libye, qui est trois fois plus grande que la France. En bref, Washington et Paris ne manquent pas d’expérience en matière de « rétablissement de la paix ».

Stoletie