Edouard Husson -Libres Propos

Rappelons-nous : pendant des années, il fallait prendre un air de connaisseur quand on nous expliquait le secret d’un Netanyahu : la méthode du chien enragé. C’était plus large que Netanyahu : l’establishment politico-militaire israélien se vantait de répandre le désordre chez tous ses voisins.

L’Occident superficiel parlait de cela comme d’un jeu de rôles. Alors qu’il y avait, derrière les mots, une politique d’oppression et de persécution des Palestiniens, les chrétiens comme les musulmans, un soutien actif aux guerres américaines pour détruire les Etats souverains de la région, et l’espoir publiquement exprimé d’une guerre avec l’Iran.

Cette politique a duré des années. Elle a consisté aussi à faire monter le Hamas contre l’Autorité Palestinienne. Puis, quand le Hamas et le Hezbollah sont devenus trop puissants, à créer Daech, avec les Américains, dans l’espoir que les « islamistes » s’entretueraient.

En fait, Israël a échoué sur toute la ligne et se retrouve aujourd’hui dans une guerre sur plusieurs fronts où des adversaires (résistants de Palestine et d’Irak, Hezbollah, Yémen Libre) mènent avec succès une guerre asymétrique.

Israël pensait, grâce à l’intelligente stratégie de négociation de Donald Trump, avoir réussi à enterrer les revendications en faveur d’une nation palestinienne. La razzia fulgurante du 7 octobre 2023, profondément humiliante pour l’Etat hébreu (d’où la tentative forcenée de substituer le récit d’un pogrom à celui de la défaite militaire et de la riposte dans la panique) a mis fin au rêve d’extinction de la revendication palestinienne.

On ne comprend pas la violence des massacres commis à Gaza si on ne voit pas ce point : les Israéliens ont dû constater qu’en matière d’intelligence stratégique et de ruse tactique, les Palestiniens sont devenus leurs égaux, sinon supérieurs. Ça ne se pardonne pas.

En réalité, Israël s’est endormi sur ses certitudes. Tel-Aviv fait face à une stratégie supérieure à la sienne, celle conçue par génial Iranien, le Général Soleimani. Là encore, l’initiative de Trump n’aura pas suffi. L’ancien président américain a fait assassiner (par traîtrise) Soleimani, mais sa stratégie de guerre asymetrique et de coordination implicite de mouvements de résistance tous formés selon le même modèle, était en place et se déroule à présent implacablement.

A force d’abuser de la stratégie du chaos, Israël a multiplié les adversaires. Se retrouvant aujourd’hui face à une coalition imbattable, les réseaux qui se partagent le pouvoir à Tel-Aviv commencent à s’affronter. Et, sous l’effet de la panique, les dirigeants et l’armée sombrent progressivement dans l’anomie.

++le gouvernement annonce des objectifs qu’il ne peut pas tenir: « éradiquer le Hamas », par exemple.

+ +les soldats israéliens se comportent de manière erratique et toujours plus sadique à Gaza. On ne compte plus les vidéos qui circulent sur les réseaux sociaux, où des soldats israéliens se vantent de meurtres arbitraires, d’explosions provoquées d’immeubles, d’humiliations infligées aux Gazaouis.
4 journalistes ont été tués depuis le 24 mars à Gaza, ce qui porte le nombre de journalistes ciblés et assassinés par Tsahal depuis le 7 octobre à 143.
Les tirs sur les personnes affamées venant se ravitailler n’ont pas cessé malgré l’indignation internationale et l’enquête de la CIJ en vue d’une éventuelle qualification des massacres de Gaza comme génocide.

++ Lu sur « Nouvelles de Palestine »: « Le rapporteur des Nations Unies en Palestine : « Israël » manipule le droit international pour commettre un génocide.Dans une nouvelle référence internationale au génocide commis par Israël dans la bande de Gaza, Francesca Albanese parle, dans un rapport qu’elle a préparé, avec un mandat du Conseil des droits de l’homme, des indicateurs de l’intention de l’occupation de tout détruire à Gaza ».

++ Les affrontements sont de plus en plus durs autour de l’hôpital Al-Shifa à Gaza. La Résistance palestinienne attire régulièrement des soldats israéliens dans des embuscades. Si les Israéliens croient combattre le seul Hamas, ils se trompent. Les attaques contre Tsahal autour d’Al-Shifa sont menées simultanément, non seulement par les brigades Al-Qassam (Hamas) mais aussi par les brigades Al-Quds (Jihad islamique palestinien pro-iranien), les brigades d’Al-Aqsa (branche armée du Fatzh) et les Brigades des Moudjahidin (mouvement indépendant).

+ +Vexations, brimades et violences continuent, de la part des autorités israéliennes, qui, malgré la politique officielle, essaient d’entraver l’accès des croyants à l’Esplanade des mosquées

+ +chaque nuit les forces de sécurité israéliennes se lancent dans des opérations sans grand résultat en Cisjordanie, mais qui font morts et blessés dans les deux camps.

++ Pour la deuxième fois en deux semaines, un combattant palestinien solitaire a déclenché une fusillade en Cisjordanie, au nord de Jéricho cette fois. Il a ensuite réussi à s’enfuir.

+ +le gouvernement Netanyahu est incapable de créer les conditions d’un retour dans leurs colonies des habitants du nord qui ont fui les tirs du Hezbollah et il essuie de ce fait des critiques toujours plus vives des médias israéliens.

++ Les frappes du Hezbollah sur des cibles militaires en Galilée ou sur des colonies juives se multiplient en réponse aux bombardements israéliens sur des zones civiles au sud du Liban.

++ En voulant mobiliser les religieux jusque-là exemptés de service militaire le gouvernement israélien ouvre la porte à une désintégration de la société israélienne.

++ Benjamin Netanyahu passe désormais plus de temps en batailles politiques internes qu’en organisation de la guerre.

+ +Benjamin Netanyahu et ses partisans ne décolèrent pas depuis que les USA ont laissé passer une résolution de cessez-le-feu au Conseil de Sécurité des Nations Unies.
La résolution en question est, sur le fond, inacceptable pour les Palestiniens (demande de libération inconditionnelle des otages israéliens) mais le fait que Russie, Chine et USA n’aient pas mis leur veto est mauvais signe pour Israël.

+ +Benjamin Netanyahu a annulé la visite d’une délégation israélienne à Washington pour discuter d’une opération à Rafah.
Washington annonce l’envoi d’une délégation militaire en Israël.

++ Deux tiers des Américains disent désapprouver une attaque israélienne au sol sur Rafah.

++ 130 parlementaires britanniques ont écrit au gouvernement britannique, lui demandant de ne plus vendre d’armes à Israël

++ les fortes tensions continuent à Amman entre manifestants et forces de l’ordre. Les manifestants protestent contre la politique pro-israélienne de leurs dirigeants. Hier soir 27 mars, la foule était nombreuse, encore plus que les jours précédents, malgré les brutalités policières depuis dimanche.

++ Je finis ce point de situation avec une pensée fervente pour les chrétiens de Gaza, si peu nombreux, non moins menacés que leurs frères musulmans. Je pense aux catholiques de Gaza qui s’identifient encore plus que d’autres, en cette Semaine Sainte, à la Passion du Christ.