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Par Louis Nadau

Invité de CNews ce mercredi 7 octobre, le philosophe Luc Ferry, lui-même ancien ministre de l’Education nationale, s’est lancé dans un vibrant plaidoyer contre le développement souhaité par Emmanuel Macron de l’apprentissage de la langue arabe au sein de l’école républicaine.

Surtout n’essayons pas, ça pourrait réussir. Invité de CNews ce mercredi 7 octobre, le philosophe Luc Ferry, lui-même ancien ministre de l’Education nationale, s’est lancé dans un vibrant plaidoyer contre le développement souhaité par Emmanuel Macron de l’apprentissage de la langue arabe au sein de l’école républicaine. Il s’agirait, selon lui, du « meilleur moyen d’islamiser la France« .

Le dossier, déjà polémique lorsqu’il était porté sous François Hollande par la ministre Najat Vallaud-Belkacem, a été relancé par le discours d’Emmanuel Macron le 2 octobre. Le président de la République y prenait clairement position : « Il nous faut aussi (…) enseigner davantage la langue arabe à l’école ou dans un périscolaire que nous maîtrisons. » « Quand nous nous ne l’enseignons pas à l’école ou dans un périscolaire qui est compatible avec les lois de la République, nous acceptons qu’il y ait plus de 60.000 jeunes aujourd’hui qui vont l’apprendre dans des associations qui leur proposent pour le pire et qui sont manipulés par ceux que j’évoquais« , expliquait-il en effet.

Une fausse solution, selon Luc Ferry. « Est-ce que vous croyez que les enfants de familles acquises aux idées des Frères musulmans ou des salafistes, est-ce que vous croyez vraiment que quand on va les obliger à mettre leurs enfants dans un établissement à l’âge de trois ans, ils vont le mettre dans un établissement public et laïc, ou dans une école juive ou catholique ? » s’étrangle le philosophe. « Enfin c’est ridicule. C’est le meilleur moyen de booster la prolifération d’écoles coraniques ou d’écoles confessionnelles. (…) Si on veut islamiser la France, c’est le meilleur moyen d’y arriver.« 

« Très peu de contrôle »

Tant pis pour l’apprentissage de l’arabe en tant que langue culturelle, et non religieuse, dans un pays comptant trois millions d’arabophones, tous dialectes confondus. Tant pis aussi pour les parents, notamment d’origine maghrébine, qui voudraient que leurs enfants apprennent l’arabe usuel au sein de l’école républicaine, et non l’arabe coranique. Il vaudrait mieux, selon l’ancien ministre de Jean-Pierre Raffarin, ne rien faire que de proposer une alternative à l’apprentissage au sein d’associations confessionnelles et d’établissements privés musulmans, sous contrat ou non. Etablissements qui n’ont toutefois pas attendu l’école publique pour se développer et enseigner l’arabe.

Dans Le Journal du dimanche, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, s’est lui aussi prononcé en faveur d’une offre d’apprentissage au sein de l’école laïque : « Quand j’étais enfant mes copains, (…) issus de familles portugaises ou espagnoles, apprenaient à l’école la langue de leurs parents. Mais mes cousins d’origine maghrébine n’avaient que la mosquée pour apprendre l’arabe… Est-ce cela que l’on veut ? Nous avons besoin de jeunes Français qui parlent aussi l’arabe. (…) L’enseigner à l’école, c’est aussi un moyen de réduire le pouvoir des religieux.« 

Mais Luc Ferry ne veut rien savoir : « Les familles catholiques iront dans les écoles catholiques, les familles juives dans les écoles privées juives, et puis les familles musulmanes vont développer les écoles coraniques, sur lesquelles on a très peu de contrôle« , insiste-t-il. Peu de contrôle, et encore moins lorsqu’il est impossible d’opposer une solution au sein de l’Education nationale aux familles pour qui l’argument linguistique ne serait qu’un prétexte déguisant une intention religieuse.

Actuellement, il existe 1.700 établissements scolaires hors contrat, qui scolarisent environ 85.000 enfants et dont un tiers sont à caractère religieux. Ces écoles privées, qui ne reçoivent pas d’argent public, ont pour seule contrainte de transmettre le même « socle commun » à leurs élèves que ceux des établissements sous contrat. Pour Emmanuel Macron, qui a promis des fermetures administratives au besoin, « il est légitime que l’Etat renforce les contrôles » sur ces écoles, s’agissant du « parcours des personnels, du contenu pédagogique des enseignements, de l’origine des financements« .

14.900 élèves apprenant l’arabe en 2019

Tout philosophe qu’il soit, Luc Ferry préjuge pourtant de l’incapacité de l’Etat à renforcer son suivi hors de l’Education nationale : « Vous ne contrôlerez pas ce qui se passe dans des écoles privées, surtout si elles ne sont pas sous contrat. Vous contrôlez très peu. On fermera comme ça, pour la galerie, deux ou trois écoles, mais ça ne servira à rien« , avance-t-il.

Au sein de l’Education nationale elle-même, Emmanuel Macron a annoncé le 2 octobre la fin des dispositifs d’Enseignements langues et cultures d’origine (Elco), sans préciser par quoi ils seront remplacés. Ces cours, créés en 1977 pour permettre aux enfants d’immigrés de garder un lien avec leur pays d’origine, étaient confiés à des professeurs recrutés, payés et encadrés par ces nations étrangères, dont notamment la Turquie, soupçonnée d’utiliser ce dispositif comme un instrument d’influence politique et religieuse.

Théoriquement, l’arabe peut déjà être appris à l’école dès le CE1, à raison de 90 minutes par semaine. En pratique cependant, seules 0,2% des familles avaient choisi cette langue, selon les chiffres relayés par Le Parisien. Au collège et au lycée, l’arabe peut être appris comme LV1, LV2 ou même LV3, mais n’a été choisi, faut d’offre, que par 14.900 élèves sur 5,7 millions à la rentrée 2019.

Marianne